Située dans la région d’Atsimo Andrefana, au nord de Toliara, l’Aire Protégée d’Amoron’i Onilahy fête cette année ses dix ans d’existence officielle. Créée le 28 avril 2015, cette zone exceptionnelle de 102 482 hectares, bordée par le fleuve Onilahy, s’étend sur deux districts – Tuléar II et Betioky Sud – et couvre quinze communes. Elle représente aujourd’hui un bastion essentiel de la biodiversité malgache et un modèle de gestion durable portée par les communautés locales.
Amoron’i Onilahy se distingue par ses écosystèmes riches et variés, typiques du Sud-Ouest de Madagascar. Elle abrite de nombreuses espèces endémiques, parfois encore méconnues, et constitue un sanctuaire écologique majeur. Son importance est amplifiée par la présence d’un site Ramsar, une zone humide d’importance internationale couvrant 75 kilomètres du cours inférieur de la rivière Onilahy (47 105 hectares). Cette zone joue un rôle fondamental dans la régulation du régime hydrologique, la prévention de l’érosion, la séquestration du carbone et la fourniture de ressources vitales aux populations riveraines.
Malgré l’isolement géographique et des routes difficiles d’accès, Amoron’i Onilahy offre un potentiel écotouristique important. Les circuits proposés permettent une immersion dans une nature préservée, entre forêts sèches, paysages fluviaux et villages authentiques. Cette dimension touristique, encore émergente, pourrait devenir un levier de développement local durable.
Depuis sa création, l’aire protégée est cogérée par la fédération communautaire MIHAVAO et l’association intercommunale OPCI OHEMIHA, avec le soutien technique et financier du WWF. Cette co-gestion a permis aux communautés locales d’accroître leur résilience économique en développant des activités génératrices de revenus durables, réduisant ainsi leur dépendance à la forêt.
Parmi les initiatives les plus marquantes figurent la culture maraîchère (notamment les poivrons et les brèdes), l’agroforesterie, la pisciculture, la production de foyers améliorés ou encore l’extraction de sel gemme. Pour Mme Lalao, femme leader du village Kamado, ces activités ont changé la vie des habitants : « Grâce à la culture des brèdes, nous avons pu scolariser nos enfants et construire des maisons en briques. Nous reconstruisons même l’église du village. »
En dix ans, les actions de MIHAVAO et de l’OPCI OHEMIHA ont permis une amélioration notable des conditions de vie et une diminution sensible de la pression sur les ressources forestières. « Notre objectif est désormais de stopper complètement la déforestation et de maintenir cette dynamique sur les dix prochaines années », affirme Rakotomanana Ratsimbazafy, Président de la fédération MIHAVAO.
Le reboisement est devenu une priorité : plus de 200 hectares ont déjà été restaurés, et les communautés s’engagent à suivre rigoureusement la croissance des plants, avec une intensification des patrouilles et de la surveillance. « Nous veillerons à ce qu’aucun plant ne soit coupé », assure Soamitahy Ramarozafy, Président de l’OPCI OHEMIHA.
Le soutien du WWF a permis d’instaurer une gouvernance locale forte et autonome. En renforçant les capacités organisationnelles et le leadership communautaire, l’organisation a contribué à l’émergence d’acteurs locaux capables de porter des décisions en faveur de la conservation. Cette approche intégrée, centrée sur la responsabilisation des populations, démontre qu’il est possible de concilier préservation de la biodiversité et développement humain.
Amoron’i Onilahy n’est pas seulement une aire protégée : c’est un symbole d’espoir pour les aires naturelles de Madagascar. Son modèle de gestion participative, les résultats tangibles obtenus et l’engagement profond des communautés montrent que la conservation peut être un moteur de changement positif. Dans un contexte où les forêts sèches de l’île sont particulièrement menacées, Amoron’i Onilahy trace la voie vers une cohabitation harmonieuse entre l’Homme et la nature.
Crédit images : WWF Madagascar/ Les Herbonautes/ Fondation pour les Aires Protégées et la Biodiversité de Madagascar
Écrit par : T. Berado