Si vous êtes amateur de road trips à moto, à la recherche d’endroits authentiques où nature, culture et engagement communautaire s’entremêlent, alors arrêtez-vous à Ankameva, dans le district d’Ambilobe, région Diana, au nord de Madagascar. Ce petit village côtier, niché entre mangroves et lagons, n’est pas seulement un havre de paix pour les amoureux de paysages bruts : c’est aussi un exemple puissant de ce que les communautés locales peuvent accomplir lorsqu’elles unissent leurs forces pour protéger leur environnement.
Créée en 2001, l’organisation communautaire d’Ankameva œuvre depuis plus de vingt ans dans la restauration et la protection des mangroves, tout en développant des activités génératrices de revenus durables pour ses habitants. Grâce à leur travail acharné, 194,4 hectares de mangroves ont été restaurés au cours des huit dernières années.
Entre décembre et mars, période de replantation, la communauté – notamment les femmes, très engagées – s’active dans la mise en terre de jeunes plants. Le reste de l’année, un suivi régulier est effectué : enlèvement des broussailles, dégagement du sable apporté par la marée, et surveillance de la circulation de l’eau. Des gestes simples mais essentiels pour garantir une croissance saine de la mangrove.
Les mangroves restaurées sont bien plus qu’un décor naturel : elles sont le cœur battant de la pêche traditionnelle locale, source principale de subsistance pour la population. Grâce à elles, poissons, crevettes, gambas et crabes se multiplient à nouveau dans les zones humides.
La pêche est strictement encadrée par la communauté. Deux espèces de poissons sont soumises à des périodes de fermeture – le maquereau indien (Rastrelliger kanagurta) et la sardinelle à queue noire (Sardinella melanura). En période d’ouverture, notamment en avril et mai, les prises peuvent atteindre 100 kg par jour par pêcheur, avant de diminuer progressivement.
Les crevettes, elles, rapportent entre 10 et 50 kg par pêcheur selon les saisons. Quant à la pêche aux crabes, elle est réservée à la consommation locale – autrefois rare, elle est aujourd’hui redevenue accessible grâce à la renaissance de l’écosystème.
Ce qui rend Ankameva unique, c’est aussi son mode de gestion communautaire inclusif. Les femmes jouent un rôle central dans la replantation et l’entretien des mangroves. Les hommes, quant à eux, se concentrent sur les patrouilles communautaires : débroussaillage, installation de pares-feux, surveillance des activités illégales…
Cette répartition des rôles permet à chacun de contribuer selon ses capacités, tout en renforçant le lien social et la résilience locale. Ankameva, c’est l’exemple même d’une économie verte et solidaire, où la nature est à la fois protégée et source de vie.
Si vous traversez le nord de Madagascar à moto, Ankameva est un détour qui en vaut la peine. Que ce soit pour rencontrer ses habitants, comprendre leur combat environnemental, ou simplement admirer un lever de soleil sur la mangrove, les pieds dans la vase et le cœur léger, cette escale vous reconnectera à l’essentiel.
C’est l’occasion de soutenir une initiative locale, d’échanger avec les femmes et les pêcheurs, d’observer des oiseaux rares, et pourquoi pas, de goûter à un plat de crevettes fraîchement pêchées.
Ankameva nous rappelle que la conservation ne se fait pas en opposition à la vie humaine, mais bien avec elle, pour elle. Ici, restaurer la nature permet de nourrir, protéger et faire vivre. C’est un message fort que chaque motard engagé devrait entendre rugir sous son casque en traversant les pistes sablonneuses du nord malgache.
Alors, à votre prochain road trip, n’oubliez pas Ankameva : un village où l’avenir se plante à la main, racine après racine.
🗺️ À découvrir : Ambilobe – Ankameva (accessible depuis la RN6, puis piste secondaire)
🏕️ Hébergement possible chez l’habitant ou en tente, à organiser à l’avance
📸 À ne pas manquer : les replantations de mangroves (décembre-mars), les scènes de pêche au lever du jour, et le calme apaisant des soirées sous les filaos
Crédit images : Fita WWF Madagascar
Écrit par : T. Berado