Motards, frères et sœurs de la route, vous qui avez déjà roulé sur les virages brumeux de la RN2 à l’aube, entre Moramanga et Andasibe, le cœur léger et les yeux grand ouverts sur les montagnes couvertes de brume… cette beauté sauvage que vous traversez ne sera peut-être bientôt plus qu’un souvenir.
La nouvelle est tombée : les forêts humides de l’Atsinanana ne sont plus sur la Liste du patrimoine mondial en péril. Sur le papier, c’est présenté comme une victoire. En réalité, c’est peut-être le début de la fin pour ces forêts anciennes qui nous accueillent à chaque virée à l’Est.
On parle d’une autoroute. D’un projet gigantesque. De coupes d’arbres, d’engins lourds, de bruit, de béton. Le même décor qu’on fuit quand on enfourche notre moto pour prendre l’air, s’éloigner de la ville, respirer la vraie nature.
Là où résonnent nos moteurs, là où vivent les lémuriens, les cris des Indri-indri et la fraîcheur des fougères géantes… on risque bientôt d’entendre des tronçonneuses.
Ce n’est pas une légende. Ce n’est pas exagéré. Et ça va trop vite. Trop discrètement. Sans même nous laisser le temps de dire au revoir à ces routes qui nous ont tant offert.
Alors si tu avais prévu de refaire ce trajet bientôt, fais-le.
Prends la route de l’Est à l’aube. Arrête-toi à Mandraka. Respire fort. Garde en mémoire chaque virage, chaque tronc mousseux, chaque lumière qui filtre entre les arbres.
Parce que demain, cette route ne sera peut-être plus la même.
Et toi, motard, témoin de ce paysage qui disparaît, n’oublie jamais que notre passion ne s’arrête pas au rugissement du moteur. Elle vit aussi dans ce qu’on choisit de protéger.
Écrit par : T. Berado