


Madagascar est en train de perdre ce qu’il a de plus précieux. Les lémuriens, symboles vivants de l’île et primates les plus anciens du monde, sont aujourd’hui menacés d’extinction non seulement par la déforestation, mais aussi par la consommation illégale de leur viande.
Selon une étude menée par la biologiste de la conservation Cortni Borgerson, près de 13 000 lémuriens sont tués chaque année. Contrairement aux idées reçues, cette chasse n’est pas principalement liée à la faim des populations rurales. La demande vient surtout des villes, portée par des consommateurs aisés, prêts à payer cher pour une viande interdite.

Pour certains, manger du lémurien est devenu un signe de prestige. La viande circule discrètement, parfois dans des restaurants ou lors de repas privés. Des croyances infondées lui attribuent un goût supérieur ou des vertus de jeunesse. En réalité, il s’agit d’un crime environnemental.
La situation est d’autant plus grave que les lémuriens ont déjà perdu l’essentiel de leur habitat. Les forêts primaires disparaissent sous l’effet de la déforestation, de l’agriculture sur brûlis et de projets d’infrastructures lourds.
La construction d’une autoroute traversant les derniers massifs forestiers aggrave cette destruction. Elle fragmente les écosystèmes, ouvre l’accès aux braconniers et accélère la disparition d’espèces déjà en danger critique.

Sur le terrain, beaucoup de chasseurs affirment qu’ils arrêteraient immédiatement s’ils avaient d’autres moyens de subsistance. Le problème n’est donc pas seulement la chasse, mais une chaîne alimentée par l’argent urbain, dans un pays où la pauvreté est massive.
Pendant que la majorité de la population lutte pour se nourrir, une minorité détruit un patrimoine naturel unique au monde pour satisfaire un caprice. Cette pratique traduit une dérive sociale et un mépris de l’héritage culturel malgache, où le lémurien est traditionnellement respecté.

Les conclusions sont claires : il faut sanctionner fermement le commerce de viande de lémurien, protéger strictement les forêts restantes, remettre en question les projets destructeurs et surtout cibler les consommateurs urbains par des campagnes de sensibilisation.
Si rien n’est fait, Madagascar risque de devenir le premier pays à avoir laissé disparaître ses espèces emblématiques, non par ignorance, mais par choix humain.
Écrit par : T. Berado

